La fertilité en 2021
Plusieurs études ont fait état d’une baisse constante du nombre moyen de spermatozoïdes au cours des dernières décennies en Europe et aux États-Unis. Entre 1970 et 2010, on observe un déclin de 50 à 60 % de la qualité du sperme dans les pays développés.1 Toutefois, il est difficile de séparer les changements de comportement social et les tendances qui retardent le démarrage d’une famille, des autres facteurs qui pourraient baisser cette fertilité, comme les facteurs environnementaux.2
On parle de subfertilité (sous-fertilité) après 12 mois d’essais infructueux. Cela concerne jusqu’à 15% des couples. 30% de ces couples n’ont pas de cause médicale identifiable. Mais ils sont plus de 70% à concevoir finalement dans les 24 mois suivant l’essai sans aucune intervention médicale. Il faut savoir que dans 30 à 50% des cas, c’est l’homme qui est en cause.
Les causes classiques
Plusieurs facteurs vont définir la fertilité d’un couple. Tout d’abord l’âge, c’est un facteur déterminant. Pour les femmes âgées de 35 à 39 ans, les chances de concevoir spontanément sont environ de la moitié de celles âgées de 19 à 26 ans.2
Pour concevoir un enfant, il faut également des rapports sexuels au bon moment. Avoir une idée du moment de l’ovulation est donc important. Une étude de Dunson et coll. (2002) a montré que la probabilité de conception est la plus haute six jours avant l’ovulation, et principalement deux jours avant. Puis elle chute nettement le jour de l’ovulation. Les méthodes de prise de température ou d’observation de la glaire peuvent être utiles pour les femmes ayant des cycles irréguliers. Selon l’OMS, 93% des femmes peuvent reconnaitre une glaire fertile d’une glaire infertile.3
Globalement, un style de vie néfaste (consommation d’alcool, de café, surpoids et tabagisme) allongerait de 7x le délai avant de tomber enceinte.4 On estime que les fumeurs sont 3,4 fois plus susceptibles de prendre plus d’un an à concevoir que les non-fumeurs, et dans chaque cycle les fumeurs ont les deux tiers des chances en moins de concevoir par rapport aux non-fumeurs.2
L’obésité est associée à un risque accru de fausse couche et de complications obstétricales telles que l’hypertension, le diabète gestationnel, le thromboembolie et l’accouchement compliqué 2
L’effet de l’alcool sur la fertilité n’est pas clair car les résultats des études sont contradictoires. Certaines études ont révélé une fertilité altérée chez les femmes buvant plus de cinq unités d’alcool par semaine, tandis que d’autres ont constaté que la consommation d’alcool en quantité faible à modérée peut être associée à un taux de conception plus élevé que chez les non-buveurs. L’excès de consommation d’alcool chez les hommes peut contribuer à l’impuissance et aux difficultés avec l’éjaculation et peut nuire à la spermatogenèse.2
Impact des polluants sur la fertilité
Avec l’augmentation de l’infertilité et la baisse de la qualité du sperme, on observe que l’incidence des tumeurs testiculaires, des cryptorchidies, et des hypospadias (malformations génitales chez le bébé) augmente. Skakkebaek déjà en 1994, ont laissé entendre qu’une augmentation des polluants œstrogéniques environnementaux pourrait être à l’origine de ces changements.2
Ces hypothèses se retrouvent confirmés par plusieurs études.5–8
L’exposition à des perturbateurs endocriniens va effectivement influencer négativement la fertilité via, chez la femme, une production hormonale perturbée, des anomalies du cycle menstruel, une diminution des follicules ovariens qui arrivent à maturité, une augmentation des cycles anovulatoires, et un vieillissement reproducteur précoce. 6 Chez l’homme, l’exposition à des perturbateurs endocriniens va produire des dommages testiculaires, avec une cytotoxicité directe sur les cellules de Leydig et de Sertoli, ce qui perturbe la spermatogenèse. 5 Le sperme sera donc de moindre qualité avec une baisse de la concentration totale, de la morphologie et de la mobilité spermatique.9
Une étude sur 325 femme, montre que les femmes ayant un apport élevé en pesticides via l’alimentation ont 18% de moins de chance de grossesse et 26% de moins de naissance vivante, que les femmes ayant un régime avec un apport faible en pesticides.13 Sur 300 hommes, en moyenne, les hommes ayant le plus grand apport en pesticide avaient 49% de spermatozoïdes en moins, et 32% de spermatozoïdes morphologiquement normaux en moins que ceux qui ont le plus faible apport en pesticide via leur alimentation.
Les molécules les plus pointées du doigt sont :
- Les pesticides (organochlorés, organophosphates, carbamates, pyréthroïdes et triazines)
- Les alternatives de plastifiant (phtalate et bisphénol A et alternatives)
- Les biphényls polychlorés (PCB), contaminant massivement déversé jusqu’en 1970,qui s’accumule dans les chaines alimentaires. Plus de 90% de l’exposition de fait via l’alimentation, il se retrouve dans les produits animaux : viande, produits laitiers, œufs, poissons…
- Le triclosan et les parabenes : se retrouvent dans les cosmétiques (principalement)
- La pollution de l’air
L’exposition aux téléphones mobiles est aussi remis en cause, dans cette méta-analyse regroupant près de 1500 patients. L’exposition aux téléphones mobiles a été associée à une diminution de la motilité du sperme (différence moyenne -8,1 %) et à la viabilité (différence moyenne -9,1 %). Les auteurs suggerent donc que l’exposition de téléphone portable affecte négativement la qualité de sperme.10
La pollution de l’air extérieur joue aussi un rôle, on observe une augmentation des fausses couches et des délais avant de tomber enceinte chez les femmes les plus exposées.7
Quelles solutions ?
Les études concordent pour démontrer que les hommes consommant plus de viande rouge, de viande transformée et de produits laitiers à teneur élevée en matières grasses ont des spermatozoïdes de faible qualité. Au contraire, de meilleurs paramètres de sperme ont été observés chez les hommes consommant une alimentation saine, riche en fruits, légumes, grains entiers et poisson. 14
On évite absolument :
- Le plastique en contact avec des aliments, surtout les substances plastifiées souples, ce sont des phtalates qui sont ajoutés pour permettre cette souplesse.
- Les produits en conserve (canettes, boites de conserve…), les gourdes en plastique ainsi que les tickets de caisse pour limiter l’exposition au bisphénol A ; On ne se fie pas au mentions BPA free (remplacés par d’autres bisphénols)
L’utilisation de contenants en plastique pendant la grossesse a été associée à des métabolites urinaires plus élevés de phtalate, tandis que la consommation en conserve de nourriture a été associée aux concentrations urinaires plus élevées de bisphénol A (BPA).
3. On diminue les produits d’origine animale, et on les préfèrera bio, locaux et de saison. On évite les poissons prédateurs.
4. La seconde main sera favorisée pour tout ce qu’on peut : vêtements, mobilier, décoration… Ils sont imprégnés de retardateurs de flamme, de colorants, de composés organiques volatiles. Le fait d’avoir déjà été lavés diminue leur imprégnation. On dépoussière régulièrement à l’eau claire et on aère ses pièces de vie 2x15minutes par jour.
Une supplémentation correcte en vitamine D est associé à une meilleure fertilité dans les parcours PMA, et serait également bénéfique pour les femmes atteintes d’OMPK et d’endométriose. 12
Sources
1. Levine H, Jørgensen N, Martino-Andrade A, et al. Temporal trends in sperm count: a systematic review and meta-regression analysis. Hum Reprod Update. 2017;23(6):646-659. doi:10.1093/humupd/dmx022
2. Taylor A. ABC of subfertility : Extent of the problem. BMJ. 2003;327(7412):434-436.
3. OMS. Planification familiale – Manuel d’utilisation à l’intention des prestataires de services du monde entier. Published online 2011. https://apps.who.int/iris/bitstream/handle/10665/97943/9780978856304_fre.pdf;jsessionid=7423B9BB6114C573DE1E4977B56E1FEE?sequence=1
4. Hassan MAM, Killick SR. Negative lifestyle is associated with a significant reduction in fecundity. Fertil Steril. 2004;81(2):384-392. doi:10.1016/j.fertnstert.2003.06.027
5. Krzastek SC, Farhi J, Gray M, Smith RP. Impact of environmental toxin exposure on male fertility potential. Transl Androl Urol. 2020;9(6):2797-2813. doi:10.21037/tau-20-685
6. Rattan S, Zhou C, Chiang C, Mahalingam S, Brehm E, Flaws JA. Exposure to endocrine disruptors during adulthood: consequences for female fertility. J Endocrinol. 2017;233(3):R109-R129. doi:10.1530/JOE-17-0023
7. Checa Vizcaíno MA, González-Comadran M, Jacquemin B. Outdoor air pollution and human infertility: a systematic review. Fertil Steril. 2016;106(4):897-904.e1. doi:10.1016/j.fertnstert.2016.07.1110
8. Axmon A, Thulstrup A-M, Rignell-Hydbom A, et al. Time to pregnancy as a function of male and female serum concentrations of 2,2′4,4′5,5′-hexachlorobiphenyl (CB-153) and 1,1-dichloro-2,2-bis (p-chlorophenyl)-ethylene (p,p′-DDE). Hum Reprod. 2006;21(3):657-665. doi:10.1093/humrep/dei397
9. Chiang C, Mahalingam S, Flaws JA. Environmental Contaminants Affecting Fertility and Somatic Health. Semin Reprod Med. 2017;35(3):241-249. doi:10.1055/s-0037-1603569
10. Adams JA, Galloway TS, Mondal D, Esteves SC, Mathews F. Effect of mobile telephones on sperm quality: a systematic review and meta-analysis. Environ Int. 2014;70:106-112. doi:10.1016/j.envint.2014.04.015
11. Pacyga DC, Sathyanarayana S, Strakovsky RS. Dietary Predictors of Phthalate and Bisphenol Exposures in Pregnant Women. Adv Nutr Bethesda Md. 2019;10(5):803-815. doi:10.1093/advances/nmz029
12. Lerchbaum E, Rabe T. Vitamin D and female fertility. Curr Opin Obstet Gynecol. 2014;26(3):145-150. doi:10.1097/GCO.0000000000000065
13. Chiu Y-H, Gaskins AJ, Williams PL, et al. Intake of Fruits and Vegetables with Low-to-Moderate Pesticide Residues Is Positively Associated with Semen-Quality Parameters among Young Healthy Men. J Nutr. 2016;146(5):1084-1092. doi:10.3945/jn.115.226563
14. Benatta M, Kettache R, Buchholz N, Trinchieri A. The impact of nutrition and lifestyle on male fertility. Arch Ital Urol Androl Organo Uff Soc Ital Ecogr Urol E Nefrol. 2020;92(2). doi:10.4081/aiua.2020.2.121